Perte de confiance : motif d’intérêt général valable pour résilier ?

Perte de confiance : motif d’intérêt général valable pour résilier ?

Perte de confiance : motif d’intérêt général valable pour résilier ? 150 150 Haize Fresko Avocats

Contrats publics – CAA Nantes, 19 janvier 2024, n° 22NT02651

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Nous en avions déjà parlé concernant les marchés publics : un acheteur peut résilier un marché public pour motif un d’intérêt général tenant dans la perte de confiance dans son titulaire, en contre partie du versement de l’indemnité de résiliation prévue au contrat (CAA Bordeaux, 11 octobre 2022, n° 21BX02814). La perte de confiance résultait alors d’échanges de courriers dans lesquels l’acheteur partageait avec le titulaire son insatisfaction répétée sur ce qu’il percevait comme des négligences, erreurs et imprécisions du titulaire et un avis technique très négatif émis par un tiers sur l’exécution du marché par le titulaire. 

La perte de confiance est-elle un motif de résiliation valable pour d’autres contrats publics ? 

Par un arrêt du 19 janvier, le juge administratif répond par l’affirmative. Il était question d’une convention d’affermage et de location gérance d’une base de loisirs, résiliée par l’acheteur pour motif d’intérêt général tenant dans la perte de confiance dans le titulaire. 

👨‍🎓Qu’en pense le juge ? 

👉Après avoir listé les nombreux faits reprochés au titulaire (à savoir que le titulaire ait « entrepris des travaux non autorisés par la convention, remettait ses rapports d’activité tardivement et de manière incomplète, n’a pas remis, malgré les demandes de Montfort communauté, un projet global de gestion des loisirs sur le site de Tremelin (…), que plusieurs activités de loisirs ont été exploitées sans accord, que la prise en charge des frais de surveillance de la baignade dans le lac de Tremelin a donné lieu à des discussions dont le résultat semble n’avoir satisfait aucune des parties, que des retards de paiement des redevances dues par la société ID Organisation ont été constatés, que cette dernière a manifesté le souhait de ne plus s’investir dans les activités de loisirs affermées et a décidé unilatéralement, à compter du 27 mars 2019, de ne plus payer la redevance due au titre du contrat d’affermage« ) ;

👉Le juge considère que « ces éléments témoignent d’une profonde détérioration des relations contractuelles, née d’une perte de confiance entre les parties faisant obstacle à la poursuite du contrat, et ont justifié par suite la résiliation unilatérale, pour ce motif qui revêt à lui seul un caractère d’intérêt général, de la convention en cause« . 

👉Il s’attarde ensuite sur l’indemnisation du titulaire, et s’il rappelle qu’il peut en cas de résiliation pour motif d’intérêt général être « indemnisé de la perte subie, c’est-à-dire des frais exposés sans contrepartie, ainsi que de son manque à gagner, c’est-à-dire de la perte des bénéfices nets qu’il pouvait légitimement escompter« , c’est à condition de démontrer la réalité de ce préjudice. Or, dans le cas d’espèce, aucun préjudice n’est démontré.

💡Qu’en retenir ? 

⭐Il s’agit d’une nouvelle illustration validant la résiliation d’un contrat public ayant pour motif d’intérêt général « la perte de confiance » dans le titulaire. 

⭐Reste que, en fonction des dispositions contractuelles, et eut égard aux agissements du titulaire, il aurait peut être été envisageable pour l’acheteur de résilier le contrat pour faute, et non pour motif d’intérêt général.